« Je suis un mélange d’anarchiste et de conservateur, dans des proportions qui restent à déterminer. » Se donnant des airs volontiers misogynes, xénophobes, machistes ou cyniques, Michel Audiard était avant tout un honnête provocateur. On l’aime par nostalgie assumée pour cette France d’avant, et/ou d’en bas, celle qui savait vivre. Audiard s’est ingénié à mettre dans la bouche de comédiens des mots d’auteur. Il se souciait peu de vraisemblance ou de psychologie. Ses dialogues n’étaient pas réalistes, ils étaient brillants. Il avait une conviction terrible : les gens sont capables de tout, d’un peu de bien certes, mais aussi de vénalité, et surtout de toutes les turpitudes, toutes les horreurs.
Par on ne sait quel don divinatoire, il lisait l’avenir: « les gens deviennent tellement cons qu’il faudra bientôt sous-titrer les films français ». Il a su créer un style inimitable, reconnaissable entre tous, la « griffe Audiard ». Il n’avait pas son pareil pour faire virevolter l’argot et autres expressions alambiquées, au sein de répliques passées à la postérité et appartenant au patrimoine du cinéma français. Orfèvre en imbécilités, gouailleur ô combien cynique, ses attaques non mouchetées lui octroient le statut non contesté de pape du cinéma à papa. Le tout porté par une liberté de ton qui permet de mesurer à distance l’emprise actuelle de ce qu’on nomme le « politiquement correct », cousin germain de la connerie.
A travers ses saillies narquoises, c’est un morceau de notre ADN qu’on aperçoit; le glorieux mauvais esprit français. Sous le microcosme de l’ironie, et la dérision audiaresque on peut séquences une partie du génome de notre réjouissante malignité. On aimerait tout retenir, la mémoire faillit. Tant mieux, on emprisonne pas une colombe. Michel Audiard a eu le sort posthume qu’il méritait: récompensé par le public et honni de la critique de son vivant, il est désormais élevé au rang de gloire nationale, y compris par ceux qui l’avaient dénigré. ça ne manquera pas de lui courir sur le haricot.
« Je suis toujours attiré par la déconnante, et la droite déconne. Les hurluberlus, les mabouls, on ne les trouve qu’à droite. La droite est branque, il ne faut jamais l’oublier. À gauche, c’est du sérieux. Ils pensent ce qu’ils disent et, c’est le moins qu’on puisse dire, ils ne sont pas très indulgents avec les idées des autres. Je n’ai jamais entendu Marcel Aymé porter des jugements sur le reste de l’humanité, ni demander des sanctions ou des châtiments ».
Il est né Paul Michael Audiard, à Paris, le 15-5-1920, de père inconnu. Sa mère, originaire de la bonne ville du Puy, le laisse rapidement sous la responsabilité d’une famille dont le chef, un oncle qui est également son parrain, œuvre aux PTT. L’enfant perdra tout contact avec sa génitrice à l’âge de 16 ans.A l’issue d’une enfance libre, dont il apprécie les charmes dans les rues de Paris, le jeune Michel, animé d’une foi exagérément mystique pour son âge, envisage un temps de devenir curé. En attendant d’affermir sa foi ,il se lance avec passion dans la lecture des grands auteurs classiques (Balzac, Zola), modernes (Proust, nous sommes dans les années 30 …) et policiers (Leroux, Leblanc …).
Certificat d’études en poche, sa première activité de livreurs de journaux fait naître en lui la passion de la bicyclette, qui l’amènera à s’engager dans des courses cyclistes sur route et sur piste, dont le point d’orgue sera sans doute une participation aux Six jours de Paris (1938).
En 1936, Michel Audiard est soudeur autogène, puis travaille dans une fabrique de verres optiques. Mais la Guerre arrive, qui le jette sur les routes comme de nombreux Parisiens. Traversant la France à bicyclette jusqu’à Perpignan, avec quelques copains, il est renvoyé dans ses pénates par l’armée allemande. Pendant l’Occupation, ses seuls soucis sont d’échapper au Service du Travail Obligatoire et de se procurer le ravitaillement nécessaire à son alimentation. Pour le reste, son activité de livreur de journaux – et les vols de vélos – lui permettent de continuer ses activités sportives. En 1944, après la Libération de Paris, le jeune homme s’engage dans le Régiment du Train jusqu’à la fin des hostilités.
L’écrivain public numéro un …
Effrayé à l’idée d’exercer toute sa vie une activité manuelle, le jeune Michel Audiard se laisse convaincre de la qualité de son écriture. Engagé à « L’Étoile du Soir », il écrit, sous divers pseudonymes, des reportages plus ou moins “bidonnés” et des nouvelles romantiques sous forme de feuilleton. Rapidement, il bifurque vers la critique de cinéma, volant au secours de Renoir, Clouzot, Lang, cloués au pilori par une épuration revancharde (on peut la comprendre …).
Il y a quelque temps, le producteur-réalisateur André Hunebelle lui a suggéré de reprendre un scénario laissé inachevé par Jean Halain, malade. C’est ainsi qu’Audiard inscrit son nom pour la première fois au générique d’un film,«Mission à Tanger» (1949). Les deux hommes travailleront à ensemble à plusieurs reprises, notamment sur «Méfiez-vous des blondes» et «Massacre en dDentelles» qui donneront parallèlement naissance à deux romans policiers homonymes publiés aux fameuses Éditions du Fleuve Noir.
Le jeune scénariste commence à se faire un nom. En 1951, Louis Jouvet, fâché avec Henri Jeanson, va se nourrir des dialogues d’Audiard dans «Une histoire d’amour» : « Hélas, madame, il n’y a aucune loi qui interdise aux imbéciles d’avoir des enfants » … Les deux hommes ont des projets ensemble, mais le maître décède un vilain 16 août de la même année.
Boulimique, Audiard enchaîne film sur film comme dialoguiste, collaborant de plus en plus souvent aux scenarii. Voici déjà ses premières collaborations avec Henri Verneuil («L’ennemi public numéro 1 », 1953) et Gilles Grangier («Poisson d’avril», 1954), qui devient son ami. Un jour, ce dernier lui fait rencontrer Jean Gabin dans un bar de Trouville : le cinéma populaire français, sans le savoir, vit là une des ses dates les plus importantes pour la décennie en cours. La première collaboration des deux artistes, «Gas oil» (1955) – un film d’atmosphère dans le monde des chauffeurs routiers – connaît un franc succès. Ils travaillent encore, entre autres et avec plus ou moins de succès, sur «Le sang à la tête» 1956), première adaptation d’un roman de Georges Simenon,
,«Le rouge est mis» (1957), première rencontre Michel Audiard / Lino Ventura,
«Maigret tend un piège», gros succès commercial,
«Les misérables» (1957), au cours duquel il plaque Jean Paul Le Chanois pour incompatibilité d’humeur,
«Les grandes familles» (1958), gros succès critique et commercial brocardant les personnages et les mœurs du monde de la finance,
«Archimède le clochard», ou comment s’asseoir sur les Grands Principes,
«Rue des prairies» (1959), tondu par « Combat » et encensé par « l’Humanité » pour populisme …
http://www.dailymotion.com/video/x641po_rue-des-prairies-1_shortfilms
Entre temps, car il faut bien vivre, notre homme produit du dialogue à droite plus souvent qu’à gauche, travaillant pour le fisc autant que pour ses petits plaisirs, qui lui valent l’un et l’autre de grosses dépenses : « Le Huitième art est celui de prendre le septième comme il vient ».
En 1957, un jeune critique des Cahiers du Cinéma, François Truffaut, a écrit : « Les dialogues de Michel Audiard dépassent en vulgarité ce qu’on peut écrire de plus bas dans le genre». Ce à quoi l’accusé répondra, au reflux de La Nouvelle Vague : « Submergés par leur propre clapotis, les nouveaux petits maîtres ont déjà de l’eau jusqu’au menton … »
Les dernières répliques du célèbre dialoguiste pour Jean Gabin – «Les vieux de la vieille» (1960)
et «Le président» (1961), lui valent le qualificatif de “gabinographe”.
Mais voici déjà qu’apparaît Lino Ventura («Un taxi pour Tobrouk», 1961) en compagnie de Maurice Biraud auquel il fait lâcher quelques bons aphorismes (« A la guerre, on devrait toujours tuer les gens avant de les connaître », …).
Dialoguiste reconnu, Michel Audiard est plus gêné lorsqu’il s’agit d’écrire un scénario. Préférant l’adaptation, il sut mettre en bouche l’ambiance noire des romans d’Albert Simonin («Le cave se rebiffe», 1961)
ou d’Antoine Blondin («Un singe en hiver», 1962, au duo Gabin-Belmondo un instant menacé de censure par le ministère de la santé !).
En 1963, Audiard “dialogue” le film d’Henri Verneuil, réunissant Jean Gabin, Alain Delon et le pote Maurice Biraud, «Mélodie en sous-sol». Sur cet énorme succès commercial, Gabin et Audiard, lassés l’un de l’autre, se séparent par consentement mutuel.
Déjà, Lino Ventura prend la place («Le bateau d’Émile», «Cent mille dollars au soleil», «La m étamorphose des cloportes», …).
La même année (1963), «Carambolages», sa première sélection officielle pour le Festival de Cannes, se fait siffler par les spectateurs.
Alors, Audiard se met au travail, avec Albert Simonin dont il adapte le roman «Grisbi or not Grisbi» (il n’en restera pas grand chose !) : il va « leur faire voir qui c’est Raoul ! ». Lino Ventura incarne le gugusse de Montauban, face à quelques éléments de la bande : Bernard Blier, Robert Dalban, et le nouveau venu, Jean Lefèvre. «Les tontons flingueurs» (Georges Lautner, 1964) est devenu aujourd’hui un film culte dont les dialogues sont ré cités par des générations qui n’étaient pas de ce monde lors de la sortie du film (1963). Sans doute son meilleur cru, au grand profit du producteur Alain Poiré : les deux hommes concocteront ensemble 21 films en 22 ans, et le financier signera des contrats en blanc à son auteur !
Tandis que le public se précipite dans les salles pour écouter ses mots (renoncement à ce qui fait l’essence même du cinéma), les critiques se déchaînent contre ce qu’ils exsudent de populisme. Henry Chapier, ennemi intime, fustige : « Vous pavoisez haut … mais vous visez bas ». Il n’y aura guère que « l’Humanité » pour soutenir régulièrement cet « anarchiste de droite qui parle du petit peuple ». Les cachets d’Audiard atteignent des sommets jamais atteints par un scénariste-dialoguiste, tandis que les dépenses sont proportionnelles : voitures rapides ou luxueuses, tables ouvertes dans les meilleurs restaurants parisiens …
Tandis que Mireille Darc, souvent mise en scène par Georges Lautner («Ne nous fâchons pas», «Fleur d’oseille»), incarne l’élément féminin souvent négligé dans l’univers du bonhomme ,
«Le pacha» (1967) marque les retrouvailles avec “Le Vieux”. Mais Audiard commence à se sentir à l’étroit dans un costume qu’il s’est trop bien taillé …
Non seulement il cause … mais en plus il réalise !
En 1968, Michel Audiard, en quête de sérieux, travaille à une adaptation de «Mort à crédit», de Louis Ferdinand Céline. Jean Gabin a donné son accord, mais les producteurs ne suivent pas. Ils veulent de l’Audiard ? Ils en auront : «Faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des canards sauvages» !
http://www.ina.fr/video/CAF97063231
Le succès du film, perturbé par les événements, est amplifié par un discours du Général sur l’état de la France, dans lequel il inverse les termes de l’énoncé. Audiard enrichi par De Gaulle, celui qui lui a sans doute donné mauvaise conscience au bon vieux temps de l’Occupation !
Le succès aidant, Audiard s’attèle à l’adaptation de l’œuvre la plus connue de Céline, et Jean-Paul Belmondo sera du«Voyage …» … mais pas les banquiers ! Tout ce qui les intéresse, c’est «Une veuve en or» (1969) !
Quant à Annie Girardot, on connaît son tempérament : «Elle boit pas, elle fume pas, elle Drague pas … mais elle cause» (1969 : notons qu’à la source elle devait ne pas b …, mais la censure est menaçante !). Trois ans plus tard, pour mieux se faire comprendre, «Elle cause plus … elle flingue» (1972) !
Entre-temps, nous aurons entendu «Le cri du cormoran le soir au-dessus des jonques», dans lequel un petit jeunot, Gérard Depardieu, exécute aveuglément les ordres (et pas que les ordres) de Bande” : Blier, Carmet, Birault, Dalban,Serrault … Le public est également décimé !.
Lorsque les finances familiales étaient en baisse, Gabin déclarait à son entourage : «Le drapeau noir flotte sur la marmite». Mais n’est pas metteur en scène qui veut, et le réalisateur ne pose guère l’œil sur l’objectif de sa caméra, tandis qu’il laisse ses comédiens faire leurs numéros. Ca lasse … alors qu’il a de plus en plus d’ennuis avec le fisc et les créanciers. Le drapeau noir ne flotte plus : il coule avec la marmite …
Lorsqu’il entame «Comment réussir quand on est con et pleurnichard» (1974), Audiard sait qu’il n’en n’a plus pour longtemps avec la réalisation. Pourtant, sans doute grâce à Carmet enfin en haut de l’affiche, le personnage d’Antoine est le plus réussi des héros qu’il a mis en scène. Dans le film suivant, Carmet prédit :«Bons baisers … à lundi» (1974). Mais ce lundi là ne viendra jamais.
Alors, Audiard règle ses comptes. Dans un montage d’archives doublé par un livre, «Vive la France», il fustige son pays et ses habitants : « A la cimaise des idées reçues … on oublie toujours le Français con ! ». A tel point que personne n’est allé le voir …
Et maintenant, il flingue …
Renvoyé à ses travaux de plume, Michel Audiard va désormais se partager entre la littérature et le cinéma. Il travaille pour Philippe de Broca(«L’incorrigible», 1975), lorsque son fils aîné se tue dans un accident de voiture, à 15 km du domicile familial. Deux mois plus tard paraît «Le p’tit cheval de retour», roman dans lequel il fait revivre à ses héros la “courette” de mai-juin 1940.
Ainsi, entre littérature et septième art, l’auteur quitte chaque jour davantage l’univers de la grosse farce satirique pour des cieux bien plus sombres.
Côté pile, il reforme un duo avec Jean-Paul Belmondo, dont il “dialogue” les grosses machineries : «Le corps de mon ennemi» (1976),
http://www.dailymotion.com/video/x7ufw5_le-corps-de-mon-ennemi-1976_shortfilms#.UZKXd4Lxky4
«L’animal» (1977),
«Flic ou voyou»,
«Le professionnel»,
«Le marginal», flic aux méthodes expéditives et encombrant pour ses supérieurs comme pour ceux qu’il traque. Notamment pour ses méthodes peu en rapport avec la légalité, mais ne manquant pas d’efficacité.
«les morfalous».
Il retrouve Delon pour le sombre et féroce «Mort d’un pourri» … Il joue le rôle de Xavier Maréchal, personnage dont le but est de retrouver l’assassin de son ami le député Phillipe Dubaye, tué dans d’étrange circonstance. Il a récupéré de ce dernier un carnet compromettant un certain nombre de personnalités influentes et qui semble être la cause de son assassinat. Il se fait alors contacter par Nicolas Tomski (Klaus Kinski), mystérieux homme d’affaire, qui semble lui aussi vouloir mettre la main sur le fameux carnet. Affaire d’Etat, corruption, euro-mondialisme, toute la verse anarchiste de droite se trouve transcendé dans ce chef d’oeuvre.
http://www.dailymotion.com/video/x4wus9_l-international-du-pognon_shortfilms#.UZKYF4Lxky4
Côté face, il écrit le combat de mots que se livrent Michel Serrault et Lino Ventura dans le chef d’œuvre verbal de Claude Miller, «Garde à vue» (1981).
L’année d’après, metteur en scène et scénariste se retrouvent pour «Mortelle randonnée», histoire d’un détective en quête de l’image de sa fille décédée, qui pourrait être celle d’Audiard autant que de Serrault.
Au rayon littérature s’achalandent «Répète un peu ce que tu viens de dire» (1975) et «La nuit, le jour et toutes les autres nuits» (1978), récit autobiographique qui révèle un homme broyé : « Je ne joue plus à rien depuis qu’une auto jaune a percuté une pile de pont sur l’autoroute du Sud et qu’un petit garçon est mort ».
Le 28 juillet 1985, miné par le cancer, il ira le rejoindre dans son caveau parisien, enterrement qu’il a voulu solitaire. Mort incompris sans doute : un anarchiste, ça n’accepte pas la Légion d’Honneur.
Mais son anarchisme transpire surtout dans un ouvrage, sorte de grand montage improbable, orchestration de la pensée biaisée de cet empêcheur de penser en rond.
Déconstruisant le mythe militaire de l’entre-deux-guerres puis de l’après-1945, nouveau chapitre du « roman national » forgé par le gaullisme, ce métrage pourrait s’inscrire dans le sillage d’un roman comme Uranus, la truculence des personnages d’Aymé ici remplacée par la voix off nasillarde et sarcastique d’un dialoguiste en verve voulant régler ses comptes avec la Grande Muette.
« Bonne fille, pas fière, la France retrousse à nouveau ses jupes, nous voulons dire ses manches » (reprise du travail après Mai 68). « A défaut d’amant musclé, elle (La France) flirte avec Léon Blum » (le Front populaire). « Soudainement, alors qu’il y avait de la joie, alors que tout allait si bien chez Madame la Marquise, incongrûment, traîtreusement, malpoliment, on passe du théâtre aux armées à celui des opérations » (10 mai 1940).
Autant de formules assassines qu’Audiard égrène durant la bonne heure de Vive la France, au service d’une conclusion courue d’avance : la France aurait connu un bien meilleur XXe siècle si elle n’avait cédé aux ambitions belliqueuses que le contexte historique lui soumettait. Cette sentence évoquée, Audiard se rapproche curieusement du mot de De Gaulle (« les Français sont des veaux ») malgré la haine manifeste qu’il éprouve pour le grand Charles, montrant le peuple toujours prêt à faire la fête juste avant une guerre (et n’hésitant pas à prolonger les festivités pendant) ou à ne pas toujours écouter la voix du bon sens (et le « documentariste » de citer celle, très suivie au contraire, de l’ambassadeur de Pologne en France, répétant durant l’été 1939 qu’Hitler « bluffe »).
Michel Audiard: « Je suis un moraliste. J’aime les auteurs qui sont moralistes : Marcel Aymé, Blondin, Nimier, Jacques Perret. Les moralistes ne sont pas toujours ceux qui étalent la morale et je pense que l’humour est pour eux un véhicule agréable. Mais quand on a de l’humour, on risque de ne pas être pris au sérieux. J’ai d’autres écrivains préférés comme Aragon, Miller et même Montherlant et Rimbaud. Je suis assez entier : si je rencontre un type qui n’aime pas Rimbaud, c’est terminé : je sais que son appartement sera stupide, sa femme idiote et que je n’aurai vraiment rien à lui dire. »
» Avant, je n’étais pas un alcoolique, j’étais un ivrogne. Je suis devenu complètement sobre au lendemain d’une cuite mémorable. En compagnie de Jean Carmet, j’avais bu sans désemparer pendant neuf heures. Quand j’ai vu toutes les bouteilles vides dans la cuisine, j’ai décider de décrocher. Chez nous, en France, toutes les occasions sont propices à la biture. On boit quand ça va, On boit quand ça ne va pas. Or, en fait, l’alcool ne procure pas la gaieté, mais la cirrhose. »
Dans plusieurs films et, surtout, dans « Le Pacha », vous mettez dans la bouche de Jean Gabin des prises de positions favorables à la peine de mort. Est-ce votre opinion propre ?
Michel Audiard : Oui. (…) je crois que la peine de mort conserve ; alors là, je suis peut-être « béret et baguette de pain », un caractère exemplaire, quoi qu’on en dise, parce que le voyou qui est arrêté croit toujours qu’il se tirera. Il pense qu’il s’évadera. (…) Alors, quand on lui coupe la tête, je n’aime pas dire cela mais il n’emmerde plus personne !
Mais comment voyait-il (Jean Gabin) le monde politique ?
Michel Audiard : Il ne le voyait pas car il avait un mépris total, complet, pour le monde politique. Incroyable même. Chez Gabin, tout est incroyable parce que tout est excessif. Ses amitiés, ses antipathies, tout. Les hommes politiques, ça lui donnait des boutons. À telle enseigne, c’est impensable mais c’est vrai, qu’il n’est plus allé chez son coiffeur où il allait depuis vingt ans, au Rond-Point des Champs-Élysées, le jour où il a su que son garçon coiffeur coupait les cheveux à Edgard Faure. C’est vous dire. Il ne pouvait pas les sentir ! Il partait du principe : quand un homme politique vous serre la main ou vous dit bonjour, c’est qu’il attend quelque chose de vous. Il ne pouvait penser que quelque chose de gratuit puisse venir d’un homme politique. Il a haï De Gaulle et détestait Giscard avec le même entrain.
Films classés par nombre d’entrées :
- 1953 : Les Trois Mousquetaires 5 534 739 entrées
- 1981 : Le Professionnel 5 243 511 entrées
- 1983 : Le Marginal 4 956 822 entrées
- 1960 : Un Taxi pour Tobrouk 4 945 868 entrées
- 1959 : Babette s’en va-t-en guerre 4 657 610 entrées
- 1958 : Archimède le clochard 4 073 891 entrées
- 1958 : Les Grandes Familles 4 042 041 entrées
- 1978 : Flic ou voyou 3 950 691 entrées
- 1953 : L’ennemi public numéro un 3 754 112 entrées
- 1983 : Les Morfalous 3 621 540 entrées
- 1963 : Mélodie en sous-sol 3 518 083 entrées
- 1960 : Les Vieux de la vieille 3 477 455 entrées
- 1963 : 100 000 dollars au soleil 3 436 161 entrées
- 1959 : Rue des prairies 3 412 201 entrées
- 1963 : Les Tontons Flingueurs 3 321 121 entrées
- 1959 : Le Baron de l’écluse 3 160 233 entrées
- 1977 : L’Animal 3 157 789 entrées
- 1955 : Gas-oil 3 096 411 entrées
- 1957 : Maigret tend un piège 3 076 005 entrées
- 1960 : La Française et l’Amour (Sketch: L’Adultère) 3 056 737 entrées
- 1955 : La Bande à papa 2 913 256 entrées
- 1979 : Le Guignolo 2 876 016 entrées
- 1959 : Maigret et l’Affaire Saint-Fiacre 2 868 465 entrées
- 1961 : Le Cave se rebiffe 2 812 814 entrées
- 1961 : Le Président 2 785 528 entrées
- 1976 : L’Incorrigible 2 568 325 entrées
- 1950 : Garou-Garou Le Passe-Muraille 2 566 767 entrées
- 1950 : Méfiez-vous des blondes 2 525 659 entrées
- 1964 : Les Barbouzes 2 430 611 entrées
- 1962 : Un singe en hiver 2 416 520 entrées
100.000 Dollars au soleil
- – Quand les types de cent trente kilos disent certaines choses, ceux d’soixante kilos les écoutent…
J.P. Belmondo - – Ici c’est une grande famille. Quand un chauffeur veut un congé ou une augmentation, il vient me voir, je l’écoute et je le vire.
G. Froebe - – Dans la vie on partage toujours les emmerdes, jamais le pognon.
J.P. Belmondo - – Tiens, ça me rappelle ma finlandaise. Tu la connais mon histoire avec la finlandaise ?
– Oui.
– Bah toi qui la connaîs pas tu vas te poiler ! Figure-toi qu’un jour sur la piste d’Ibn Saoud, j’tombe sur un p’tit ingénieur des pétroles avec sa Land Rover en rideau. Il avait sa bonne femme avec lui, là, une grande blonde avec des yeux qu’avaient l’air de rêver et puis un sourire d’enfant : une salope quoi. Moi je repêre ça tout de suite parce que les femmes c’est mon truc. – C’est pas comme le pelletage, hein ?!
– Alors, aussi sec, je propose au p’tit ingénieur : Si vous voulez, j’amêne vot’ dame à Agdid et puis j’envoie la dépanneuse… Le branque dit oui, et me v’là barré avec la poupée… C’est pas vrai, Saïd ?
– Si, c’est vrai ! Et c’est même vachement intéressant ! Tu vas bosser un peu, dis ! Hein !
– Une seconde, ça l’intéresse !… Hein, qu’ça t’intéresse ?… Alors, sitôt parti, j’me mets à conduire d’une main… Et v’là qu’la môme se met à faire des minauderies… Tu sais, façon pudeur… Des p’tites maniêres de bonnes femmes, quoi!… Sous prétexte que Saïd était en train d’prendre un jeton !… Et à ce moment-là, on arrive dans la zone des dunes… Alors j’dis à ma Finlandaise : Est-ce que vous avez déjà vu la Rose des Sables ? Non, qu’elle me fait !… Alors j’arrête le bahut et j’dis : Voyez la dune, là-bas? Eh ben, derriêre, y’a les plus belles Roses des Sables de tout l’Niger… Eh ben, elle a voulu y’aller voir…
L. Ventura / B. Blier - Si le crédit n’existait pas, y’a longtemps qu’l’Afrique serait morte !
J.P. Belmondo - Tu vas encore traîner un peu, tu feras encore des p’tites saloperies, comme ça, pour la gamelle. Puis tu glisseras doucement vers la côte des Palmes. Tu finiras clodo à Abidjan et tu te feras descendre un jour en piquant un porte-monnaie ou un litre de rouge. Je te filerais bien mon poing dans la gueule, mais t’irais encore te prendre au sérieux.
L.Ventura - – On serait riches, on sera heureux.
– Où est-ce que tu as appris que l’argent faisait le bonheur? T’a été élevé chez les laïcs, toi?
J.P. Belmondo - Je croyais que c’était juste un casse-croute. Mais maintenant monsieur becte à la carte.
- Quand les passions s’en mêlent, y’a plus de types solides.
L.Ventura
Les Tontons Flingueurs
- Louis de retour. Présence indispensable.
Présence indispensable … Aprês quinze ans de silence, y’en a qui poussent un peu quand même. Quinze ans d’interdiction de séjour. Pour qu’il abandonne ses cactus et qu’il revienne à Paname, faut qu’il lui en arrive une sévêre au vieux Louis. Faut qu’il ait besoin de pognon ou qu’il soit tombé dans une béchamelle infernale.
L.Ventura - – Hé bien ma vieille, tu nous fait attendre. La route a pas été trop toc ?
– Ben suffisamment.
– Ça fait plaisir de te revoir. Le mexicain commençait à avoir des impatiences.
– Ah bon, parce qu’il est revenu, c’est pas un charre ?
– Ah ben, je ne me serais pas permis.
– Avoue que ça fait quand même une surprise, non ?
– Des surprises, t’es peut-être pas au bout. Viens.
« Henri »/L.Ventura - – Henry, fais tomber cent sacs au toubib.
Le Mexicain - – Je suis revenu pour canner ici, et pour me faire enterrer à Pantin avec mes vioques. Les Amériques, c’est chouette pour prendre du carbure. On peut y vivre, à la rigueur. Mais question de laisser ses os, hein, y’a que la France.
Le Mexicain - – Maintenant que tu es dans l’honnête, tu peux pas savoir le nombre de malfaisants qui existent.
Le Mexicain - – Mais le mexicain, ç’a été une épée, un cador. Moi j’suis objectif, on parlera encore de lui dans cent ans. Seulement faut bien reconnaître qu’il avait décliné, surtout de la tête.
– C’est vrai qu’sur la fin il disait un peu n’importe quoi. Il avait comme des vaps, des caprices d’enfant.
– Enfin, toi qui y a causé en dernier, t’as sûrement remarqué ?
– Remarqué quoi ?
– T’as quand même pas pris au sérieux cette histoire de succession ?
– Pourquoi ? Fallait pas ? Ben, j’ai eu tort.
– Ah, ah. Et voilà.
– Tu vois, Raoul, c’était pas la peine de s’énerver, monsieur convient.
– Y’en a qu’abuseraient de la situation, mais mon frêre et moi, c’est pas notre genre. Qu’est-ce qu’on pourrait faire qui t’obligerait ?
– Décarrer d’ici. J’ai promis à mon pote de m’occuper de ses affaires. Puisque je vous dis que j’ai eu tort, là. Seulement, tort ou pas tort, maintenant c’est moi le patron. Voilà.
– Écoute, on te connaît pas. Mais laisse-nous te dire que tu te prépares des nuits blanches, des migraines, des nervous breakdown, comme on dit de nos jours. – J’ai une santé de fer. Voilà quinze ans que je vis à la campagne, que je me couche avec le soleil, et que je me lêve avec les poules.
B.Blier/J.Lefebvre/L.Ventura - – C’est quand même marrant les évolutions, quand je l’ai connu le mexicain, il recrutait pas chez tonton ! – Vous savez ce que c’est : l’âge, l’éloignement. A la fin de sa vie, il s’était lancé sur le reclassement des légionnaires. – Ah si c’est une œuvre, c’est autre chose !
L.Ventura - – Mais qu’est-ce que c’était que cette fusillade ? On ne se serait pas permis de vous flinguer sur le domaine ?
– Eh ben, on s’est permis.
Thomas/L.Ventura - Le Mexicain l’avait achetée en viager à un procureur à la retraite. Aprês trois mois, l’accident bête. Une affaire.
V.Venantini - Quand le lion est mort, les chacals se disputent l’empire. On ne peut pas leur en demander plus qu’aux fils de Charlemagne.
F.Blanche - – Your room is ready, sir !
– Il veut dire que votre chambre est prête.
– Dites donc, il picole pas un peu, votre british ?
– Oh là là ! Et puis, il est pas plus british que vous et moi. C’est une découverte du mexicain.
– Il l’a trouvé où ?
– Ici. Il l’a même trouvé devant son coffre-fort. Il y a 17 ans de ça. Avant d’échouer devant l’argenterie, l’ami Jean avait fracturé la commode Louis XV. Le mexicain lui est tombé dessus juste au moment où l’artiste allait attaquer les blindages au chalumeau.
– Je vois d’ici la petite scêne.
– Vu ses principes, le patron ne pouvait pas le donner à la police, ni accepter de régler lui-même les dégats. Résultat : Jean est resté ici 3 mois au pair comme larbin pour régler la petite note. Et puis, la vocation lui est venue, le style aussi, peut-être également la sagesse. Dans le fond, nourri, logé, blanchi, 2 costumes par an, pour un type qui passait la moitié de sa vie en prison…
– Il a choisi la liberté, quoi.
R.Dalban/F.blanche/L.Ventura - – Du thé à sept heures du soir ?
– Ben, c’est-à-dire qu’en ce moment, je suis un tantinet décalé dans mes horaires, oui.
Patricia/L.Ventura - – Mais ces mecs-là n’auraient quand même pas la prétention d’engourdir le pognon de ma niêce, non ?
L. Ventura - – L’éducation de la princesse, cheval, musique, peinture…atteint un budget elyséen. Et vos dépenses somptuaires prennent des allures africaines.
F.Blanche - – Chêre Madame, on m’a fait état d’embarras dans votre gestion, momentannés j’espêre. Souhaiteriez-vous nous fournir quelques explications?
– Des explications, Monsieur Fernand, y’en a deux : récession et manque de main d’oeuvre. C’est pas que la clientêle boude, c’est qu’elle à l’esprit ailleurs. Le furtif par exemple, a complêtement disparu.
– Le furtif?
– Le client qui venait en voisin. »Bonjour Mesdemoiselles, au revoir Madame »..; Au lieu de descendre aprês le dîner y reste devant sa télé pour voir si, par hasard, y serait pas un peu l’Homme du XXême siêcle ! Et l’affectueux du Dimanche? Disparu aussi ! Et pourquoi? Voulez-vous me dire?
– Encore la télé?!
– L’auto, Monsieur Fernand, l’auto !
– Vous parliez aussi de pénurie de main d’oeuvre?
– Alors la Monsieur Fernand, c’est un désastre. Une bonne pensionnaire ça devient plus rare qu’une femme de ménage. Ces dames s’exportent… Le mirage africain nous fait un tord terrible. Si ça continue, elles iront à Tombouctou à la nage !
L. Ventura/D.Davray - – J’dis pas que Louis était toujours três social,non, il avait l’esprit de droite. Quand tu parlais augmentation ou vacances, il sortait son flingue avant que t’aies fini, mais il nous a tout de même approté à tous la sécurité.
D.Vavray - – Patricia, mon petit, je ne voudrais pas te paraître vieux jeux et encore moins grossier…L’homme de la pampa parfois rude, reste toujours courtois… Mais la vérité m’oblige à te le dire: Ton Antoine commence à me les briser menu!
L.Ventura - – Non mais t’as déjà vu ça? En pleine paix.
Y chante et puis crac, un bourre-pif!
Mais il est complêtement fou ce mec!
Mais moi, les dingue j’les soigne.
J’m’en vais lui faire une ordonnance, et une sévêre !
J’vais lui montrer qui c’est Raoûl.
Aux quatre coins de Paris qu’on va le retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle.
Moi quand on m’en fait trop, j’correctionne plus, j’dynamite, j’disperse, j’ventile…
B. Blier - – Mais y connaît pas Raoûl ce mec!.. Y va avoir un réveil pénible… J’ai voulu être diplomate à cause de vous tous, éviter qu’le sang coule… Mais maintenant c’est fini… je vais le travailler en férocité… le faire marcher à coups de latte… Ama pogne je veux le voir… Et je vous promets qu’y demandera pardon!… Et au garde-à-vous!
B.Blier - – Je raccompagne ce petit jeune homme.
– Ne vous donnez pas cette peine, je connais le chemin.
– Oui, ben il faudrait voir à l’oublier.
– Soit, les maniêres y gagneront ce que l’amitié y perdra.
– Ben, c’est ça, on s’aimera moins !
L.Ventura/C.Rich - – Y’a des impulsifs qui téléphonent, d’autres qui se déplacent.
H.Frank - – La psychologie, y’en a qu’une: Défourailler le premier.
– C’est un peu sommaire, mais ça peut être efficace.
V.Venantini - – Le prix s’oublie. la qualité reste.
V.Venantini - – Bougez pas !… Les mains sur la table ! Je vous préviens qu’on a la puissance de feu d’un croiseur, et des flingues de concours.
– Si ces messieurs veulent bien m’les confier.
B.Blier/R.Dalban - – Les ruptures, les retrouvailles: Les fluctuations de la fesse.
- – Maintenant les diplomates prendraient le pas sur les hommes d’actions. L’époque serait aux tables rondes et à la détente.
J. Lefebvre - – Touche pas au Grizzby… salope !!!!
– D’l’alcool à cet âge là !
– Non mais c’est un scandale !
– Nous par contre on est des adultes,.. on pourrait peut être s’en faire un ptit ! - – Maître Folasse ?
– Seulement le tout venant a été piraté par les mômes, alors qu’est ce qu’on fait, …on s’risque sur l’bizarre, …ça va rajeunir personne!
– Tiens vous avez sorti le vitriole !
– Pourquoi vous dites ça ?
– Ca a l’air honnête !
– Sans être franchement malhonnête, au premier abord, comme ça il a l’air assez curieux
– Y date du mexicain, du temps des grandes heures, seulement on a du arrêter la fabrication, y a des clients qui devenaient aveugles, alors ça faisait des histoires !
– Faut reconnaître, c’est du brutal!
– Vous avez raison c’est du curieux !
– J’ai connu une Polonaise qu’en prenais au petit déjeuner …, faut quand même admettre, c’est plutôt une boisson d’homme !
– Tu sais pas ce qu’il me rappel, cet espêce de drôlerie qu’on buvais dans une petite tôle de Biên Hoa pas três loin de Saigon,… les volets rouges, … et la tauliêre, une blonde comme ac, …comment qu’elle s’appelait déjà?
– Lulu la Nantaise !
– T’as connu ?
– J’y trouve un gout de pomme
– Y en a !
– Et c’est devant chez elle que Lucien le Cheval s’est fait dessouder
– Et par qui?
– Bah v’la que j’ai plus ma tête !
– Par teddy de Montréal, un fondu qui travaillait qu’à la dynamite
– Toute une époque … !
F.Blanche/J.Lefebvre/ L/Ventura/B.Blier/R.Dalban - – Les cons ça ose tout. C’est même à ça qu’on les reconnaît.
L.Ventura - – La jeunesse boit de l’eau pétillante et les anciens combattants, des eaux de régime.
- – Tu sais combien ça laisse une roulette?… 60% de velours
– Et sur le plan des emmerdements 36 fois la mise!
L.Ventura - – C’est jamais bon de laisser traîner les créances, et surtout de permettre au petit personnel de réver.
L.Ventura - – Alors? Y dors le gros con?… Bah y dormira encore mieux quand il aura pris ça dans la gueule! Il entendra chanter les anges le gugusse de Montauban… Je vais le renvoyer tout droit à la maison mêre… Au terminus de prétentieux. B.Blier
- – C’est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des phrases.
F.Blanche - – Si vous restiez en retrait?
– N’empêche, qu’à la retraite de Russie, c’est les mecs qu’étaient à la traîne qui se sont fait repasser.
V.Venantini/L.Ventura
Le Président
- – On est gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis.
P.Larquey - – Je suis un mélange d’anarchiste et de conservateur, dans des proportions qui restent à déterminer.
J.Gabin - – Sauf pour les dictateurs et les imbéciles, l’ordre n’est pas une fin en soi.
J.Gabin - – Je crois avoir été l’un des hommes les plus détesté de son époque, ce fût longtemps mon chagrin, c’est aujourd’hui mon orgueil.
J.Gabin - – Dans les journaux, c’est toujours les mêmes qu’on cite… Pas étonnant qu’ils soient connus…
A. Adam - – Les vieillards c’est comme les bébés ça change tous les jours.
J.Gabin - – Les amis n’aiment pas être fidêles. Ils ont l’impression de perdre leur personnalité.
J.Gabin - – C’est une habitude bien française que de confier un mandat aux gens et de leur contester le droit d’en user.
J.Gabin - – Ma chêre amie, Wagner est inécoutable ou sublime selon les goûts, mais exquis, sûrement pas!
J.Gabin - – J’ai besoin d’un coup de main, toi tu peux tout!
– C’est justement pour cela que je ne peux pas tout me permettre.
J.Gabin - – Dans chaque cambrioleur, il y a un Préfet de police qui sommeille.
- – Pour ne pas être nouvelle, l’idée de fédération européenne n’en est pas moins généreuse. Généreuse mais utopique.
– La suppression des systêmes douaniers, le libre-échange sont autant de formules qui relêvent du manuel de littérature mais qui constitue un défi permanent au manuel d’arithmétique.
– Est-ce parce qu’il sera européen que le mêtre va devenir extensible?
– Est-ce par ce qu’elle va devenir européenne que la tonne de charbon va doubler de valeur? – Est-ce parce qu’elle sera européenne que la France augmentera en puissance et en prospérité?
– Le projet d’union douaniêre dont le gouvernement nous invite à voter la confiance, est mis en pratique depuis longtemps par les contrebandiers.
– Est-ce une raison suffisante pour l’adopter?
B.Blier - – Messieurs, Monsieur le Député Chalamont vient d’évoquer en termes émouvants les victimes de la guerre… Je m’associe d’autant plus volontiers à cet hommage qu’il s’adresse à ceux qui furent les meilleurs de mes compagnons…
Au moment de Verdun, Monsieur Chalamont avait dix ans… Ce qui lui donne, par conséquent, le droit d’en parler… Étant présent sur le théâtre des opérations, je ne saurais prétendre à la même objectivité… On a, c’est bien connu, une mauvaise vue d’ensemble lorsqu’on voit les choses de trop prês !… Monsieur Chalamont parle d’un million cinq cent mille morts, je ne pourrais en citer qu’une poignée, tombés tout prês de moi…
J’ai honte, Messieurs… Je voulais montrer à Monsieur Chalamont que je peux, moi aussi, faire voter les morts… Le procédé est assez méprisable, croyez-moi !…
Messieurs, j’ai devant moi un três joli dossier, três complet, três épais, trois cents pages de bilans et de statistiques que j’avais préparé à votre intention… En écoutant Monsieur Chalamont, je viens de m’apercevoir que le langage des chiffres a ceci de commun avec le langage des fleurs… on lui fait dire c’que l’on veut !… Les chiffres parlent mais ne crient jamais… C’est pourquoi ils n’empêchent pas les amis de Monsieur Chalamont de dormir. Vous me permettrez donc de préférer le langage des hommes. Je le comprends mieux !…
Durant des années, à travers le monde, j’ai visité des mines, des camps de personnes déplacées… j’ai vu la Police charger les grévistes, je l’ai vue aussi charger des chômeurs… j’ai vu la richesse de certaines contrées, j’ai vu l’incroyable pauvreté de certaines autres… Durant toutes ces années, je n’ai jamais cessé de penser à l’Europe… Monsieur Chalamont a passé une partie de sa vie dans une banque à y penser aussi… Nous ne parlons forcément pas de la même Europe…
Lorsqu’il y a quelques mois, les plus qualifiés parmi les maîtres-nageurs de cette assemblée sont venus me trouver pour éviter une crise de régime, j’ai pris un engagement… celui de gouverner… Or, gouverner ne consiste pas à aider les grenouilles à administrer leur mare !… Tout le monde parle de l’Europe… Mais c’est sur la maniêre de faire cette Europe que l’on ne s’entend plus… C’est sur les principes essentiels que l’on s’oppose…
Pourquoi croyez-vous, Messieurs, que l’on demande à mon gouvernement de retirer le projet de l’Union Douaniêre qui constitue le premier pas vers une Fédération future ?… Parce qu’il constitue une atteinte à la souveraineté nationale ?… Non… Simplement parce qu’un autre projet est prêt… Un projet qui vous sera présenté par le prochain gouvernement… Je peux, Messieurs, vous en énoncer d’avance le principe !…
La constitution de trusts verticaux et horizontaux, de groupes de pressions qui maintiennent sous leur contrôle non seulement les produits du travail, mais les travailleurs eux-mêmes !…
On ne vous demandera plus, Messieurs, de soutenir un ministêre, mais d’appuyer un gigantesque conseil d’administration !…
Si cette assemblée avait conscience de son rôle, elle repousserait cette Europe des maîtres de forges et des compagnies pétroliêres… Cette Europe, qui a l’étrange particularité de vouloir se situer au-delà des mers, c’est-à-dire partout… sauf en Europe !… Car je les connais, moi, ces européens à têtes d’explorateurs !
– Je demande que les insinuations calomnieuses que le Président du Conseil vient de porter contre les Élus du Peuple ne soient pas publiées au Journal Officiel.
– J’attendais cette protestation… Je ne suis pas surpris qu’elle vienne de vous, Monsieur Jussieu… Vous êtes, je crois, conseil juridique des aciéries Krenner ?… Je ne vous le reproche pas…
– Vous êtes trop bon !…
– Je vous reproche simplement de vous être fait élire sur une liste de gauche et de ne soutenir à l’Assemblée que des projets d’inspiration patronale !
– Il y a des patrons de gauche, je tiens à vous l’apprendre !
– Il y a aussi des poissons volants, mais ils ne constituent pas la majorité du genre !…
La politique, Messieurs, devrait être une vocation… Elle l’est pour certain d’entre vous… Mais pour le plus grand nombre, elle est un métier… Un métier qui, hélas, ne rapporte pas aussi vite que beaucoup le souhaiteraient, et qui nécessite d’importantes mises de fonds car une campagne électorale coûte cher ! Mais pour certaines grosses sociétés, c’est un placement amortissable en quatre ans… Et s’il advient que le petit protégé se hisse à la présidence du Conseil, le placement devient inespéré… Les financiers d’autrefois achetaient des mines à Djelitzer ou à Zoa, ceux d’aujourd’hui ont compris qu’il valait mieux régner à Matignon que dans l’Oubangui et que de fabriquer un député coûtait moins cher que de dédommager un Roi Nêgre !… Que devient dans tout cela la notion du Bien Public ? Je vous laisse juges…
Le gouvernement maintient son projet. La majorité lui refusera la confiance et il se retirera… Il y était préparé en rentrant ici…
J’ajouterai simplement, pour quelques uns d’entre vous, réjouissez-vous, fêtez votre victoire… Vous n’entendrez plus jamais ma voix et vous n’aurez plus jamais à marcher derriêre moi… Jusqu’au jour de mes Funérailles Nationales, que vous voterez d’ailleurs à l’unanimité… Ce dont je vous remercie par anticipation…
J.Gabin - – Qu’est ce qu’il a? Il s’applique aujourd’hui. il est encore plus mauvais que d’habitude.
Un député - – Vous êtes intelligent, comme la plupart des salauds d’ailleurs. Vous savez qu’il y a des hommes qu’on achête avec une enveloppe ou un bout de Légion d’honneur. Mais vous avez essayé de m’avoir par la vanité. c’est ignoble
J.Gabin - – Si la croissance s’arrête de bonne heure, un homme ne cesse jamais de grandir.
J.Gabin - – Il y a des patrons de gauche
– Il y a aussi des poissons volants, mais qui ne constituent pas la majorité du genre.
Un député/J.Gabin - – Quand on ne veut pas du pouvoir on le refuse! On peut três bien vivre dans l’ombre…
– Et ne jamais en sortir! Vous en savez quelque chose.
Un député/J.Gabin - – Dîtes-vous bien que quand un mauvais coup se mijote, il y a toujours une république à sauver
J.Gabin - – Il y a une chose plus grave que la trahison, c’est la bêtise.
J.Gabin - – Le repos, c’est fait pour les jeunes. Ils ont toute la vie devant eux.
J.Gabin - – A mon âge, on vit en veilleuse.
J.Gabin
Le Pacha
- – Autrefois, avant que le béton mange l’herbe…
J.Gabin - – Tout le monde parle d’infarctus, de cirrhose, de cancer. Moi je dis que la pire maladie des hommes c’est de donner tout son amour à une seule bonne femme.
J.Gabin - – C’est un accident, un regrettable accident…
– La mort de Louis XIV aussi.
J.Gabin - – Quand on a cravaté Jo-les-Grands-Pieds, t’as fait un beau rapport, t’as toujours été fort en rédac. Mais tous les deux, on lui doit quêlque chose, au Grands-Pieds ! Toi, de l’avancement et moi, six mois d’hosto. Mais ce matin, j’étais bon pour la médaille posthume, alors tu m’excuseras, j’ai quitté la piste…
R.Dalban - – Quand on mettra les cons sur orbite, t’as pas fini de tourner.
J.Gabin - – Quand on tue un poulet, c’est fou c’qu’y’a comme parties d’poker qui s’organisent chez les voyous !
J.Gabin - – L’un d’nous deux bute l’autre… Toi, on t’raccourcit, moi, on m’félicite… Ch’ais bien qu’c’est injuste parce que c’est injuste… mais c’est comme ça… T’as contre toi quarante ans de bons et loyaux services et une vie exemplaire…
J.Gabin - – Remarque que l’essentiel, c’est d’se conduire comme un homme… Partir la tête haute aux Assises, parce que aprês, on sait pas c’qui peut lui arriver…
J.Gabin - – Vous avez quand même pas dans l’idée de me faire porter le chapeau?- Nous, quand y’en a un qui traîne, faut qu’on lui trouve une tête. A la pointure ou pas.
- – J’évoque, je balance pas.
D.Carrel - – Le genre d’homme qui veut tout casser, et qui casse jamais rien.
D.Carrel - – Y devrait y avoir des cliniques pour les obsédés (sexuels)
– Y’en avait mais on les a fermées. - – Le crétin chimiquement pur,j’me demande où tu vas l’chercher ?
– Trente-six Quai des Orfêvres. J’suis fidêle à mes fournisseurs.
D.Carrel/M.Garrel - – A partir de seize ans, si on rapportait rien à la maison, on regardais les autres becqueter. Ca forme le caractêre. A dix-huit ans on entrait en maison de redressement comme dans d’autres familles on entre au séminaire.
D.Carrel - – J’ai des envies d’voyages… L’Océanie, Bora-Bora, les vahinés… Tu connais ?
– Pourquoi ? Tu veux m’emmener ?
– On n’emmêne pas des saucisses quand on va à Francfort.
– Tu pourrais dire « Une rose quand on va sur la Loire »… Question d’termes…
A.Pousse/D.Carrel - – Alors, ton Olympiade du hold-up, où t’en es ?…
– J’vous l’ai déjà dit. On braque un fourgon postal. L’influence anglaise, comme dans tout, quoi…
– D’ici à ce que vous alliez achetier vos cagoules chez Old England, y’a pas loin !
J.Gabin/F.Marten - – Dis donc, Ernest, entendons-nous bien. T’as besoin d’moi, j’ai besoin d’toi, on traite… Mais un casseur doublé d’une donneuse, tu voudrais tout d’même pas que j’t’embrasse… Hein ?
J.Gabin - – Les bastos, c’est plus facile à donner qu’à recevoir. Je suis sûr que t’avais jamais pensé à ça.
J.Gabin - – Oh, écoute, Paul, moi, le mitan, j’en ai jusque-là !… Ca fait quarante ans que le truand nous charrie! J’l’ai digéré à toutes les sauces et à toutes les modes… En costard bien taillé et en blouson noir… Ça tue, ça viole, mais ça fait rêver le bourgeois et reluire les bonnes femmes. Elles trouvent peut-être ça romantique, mais moi pas !… Moi, les Peaux-Rouges, j’vais pas les envoyer devant les jurés de la Seine, comme ça, y’aura plus de remise de peine et de non-lieu… J’vais organiser la Saint-Barthélémy du mitan.
J.Gabin - – Quand on parle pognon, à partir d’un certain chiffre, tout le monde écoute.
J.Gabin
Mélodie en Sous-Sol
- – La liberté sonne à sept heures dans toutes les prisons de france.
J.Gabin - – Dans les situations tendues, quand tu parles fermement avec un calibre en pogne, personne ne conteste. Y’a des statistiques là-dessus.
J.Gabin - – Il est d’une honnêteté monstrueuse, un vrai pervers, enfin je veux dire. Il n’a jamais eu une contredanse quoi…
A. Delon - – Écoute-moi bien. A partir de maintenant, travaille au chrono parce qu’une minute d’écart ça veut pas dire forcément 60 secondes. Ça peut se transformer en années de placard.
J.Gabin - – La liberté à soixante-dix mille francs par mois, c’est pas ma pointure.
J.Gabin - – Ah, parce que le p’tit hôtel-restaurant, t’appelle ça l’indépendance, toi ! Alors, j’vais t’dire quelque chose: J’me suis pas tapé cinq piges de placard pour venir piquer thune par thune l’oseille des congés payés.
J.Gabin - – Bourrés de pognon et inconnus, c’est à dire honorables.
J.Gabin - – Erreur de jeunesse , ça s’appelle ! Justement pour qu’on n’en cause plus !
A.Delon - – Quand on a pas de bonnes pour garder ses chiards, eh bien on en fait pas.
A. Delon - – Un jour, c’est ton pêre et moi que tu tueras! De chagrin !
– Et bien, comme ça, on retrouvera pas l’arme du crime !
G.Montero/A.Delon - – Moi, tu vois, j’vais t’dire, question spectacle, j’serais plutôt porté sur le nu, moi. Mayol, les Folies… Le visuel, quoi
M.Biraud - – Ça prouve qu’on peut être pucelle en tout! Moi, j’me demandais ce qui n’avait pas encore servi chez toi. Et bien, je viens de m’apercevoir que c’est la mémoire!
A.Delon - – Y’a du vison dans l’air! Et les putes ont toujours aimé les animaux
A.Delon - – Le boulot, c’est un truc qu’y vaut mieux commencer jeune. Quand tu demarres tout môme, c’est comme si t’étais né infirme: tu prends le pli et t’y penses plus.
M.Biraud - – Les bonnes affaires, ça se paye comptant
J.Gabin - – Quand t’es devant le Parthénon et que tu vois que c’est encore debout, tu te dis, quand même, que ça c’était de la construction. Aujourd’hui, tu frappes au septiême étage et y’a un mec au rez-de-chaussée qui te dis « Entrez donc ».
- – La confiance dans les gens viennent quand ils prennent de l’âge.
J.Gabin - – Prends un billet de seconde. C’est moins voyant et c’est dans tes goûts.
J.Gabin - – Dans la vie y’a pas de drame, y’a que des fatalités.
Un Singe en Hiver
- – Matelot Hénault Lucien, veuillez armer la jonque, on appareille dans cinq minutes.
– C’est parti
– Albert, je vous en prie, vous n’allez pas encore tout me saloper comme la derniêre fois.
– Madame, le droit de navigation sur le Yang Tse Kiang nous est formellement reconnu par la convention du 3 août 1885. Contesteriez-vous ce fait ?
– Je ne conteste rien. Je vous demande simplement de ne pas tout me casser comme l’autre jour.
– Oh… mais pardon ! L’autre jour, les hommes de Chung Yang Tsen ont voulu jouer au con. Heureusement que j’ai brisé la révolte dans l’oeuf, sans barbarie inutile, il est vrai. On n’a coupé que les mauvaises têtes ; le matelot Hénault peut témoigner.
– Sur l’honneur.
– Bon. Nous allons donc poursuivre notre mission civilisatrice. Et d’abord, j’vais vous donner les derniêres instructions de l’Amiral Guépratte, rectifiées par le Quartier-Maître Quentin ici présent. Voilà : l’intention de l’Amiral serait que nous perçions un canal souterrain qui relierait le Wang-Ho au Yang-Tse-Kiang.
– Le Yang Tse Kiang… bon…
– Je ne vous apprendrais rien en vous rappelant que Wang Ho veut dire fleuve jaune et Yang Tse Kiang fleuve bleu. Je ne sais si vous vous rendez-compte de l’aspect grandiose du mélange : un fleuve vert, vert comme les forêts comme l’espérance. Matelot Hénault, nous allons repeindre l’Asie, lui donner une couleur tendre. Nous allons installer le printemps dans ce pays de merde !
– Bon… Je vois qu’vous êtes raisonnables, j’vous laisse… J’ai des clients à servir, moi.
– Eh ! Dites donc, l’Indigêne ! Un peu d’tact, hein !… Parlons d’autre chose !… Parce qu’on les connaît, vos clients ! La Wermacht polissonne et l’Feldwebel escaladeur !… Hein !… Et puis merde, j’vous raconterais plus rien, là !
– Chut, Albert ! Vous fâchez pas !
– Mais vous fâchez pas, vous fâchez pas ! Mais, nom de Dieu d’bordel, j’vous offre des riviêres tricolores, des montagnes de fleurs et des temples sacrés et vous m’transformez tout ça en maison d’passe !… Vous plantez votre Babylone normande dans ma Mer de Chine !… Alors !… Matelot Esnault !
– Oui, Chef !
– On va brûler l’village !… Où sont les grenades, que j’les dégoupillent !…
– Monsieur Quentin !… Calmez-vous !… Je vous demande pardon !…
– Une reddition ?… Soit !… La main d’fer dans l’gant d’velours !… Matelot, à vos pagaies !
– Oui, Chef !
– Attention aux roches !… Et surtout, attention aux mirages !… Le Yang-Tsé-Kiang n’est pas un fleuve, c’est une avenue… Une avenue d’cinq mille kilomêtres qui dégringole du Tibet pour finir dans la Mer Jaune, avec des jonques et puis des sampans d’chaque côté… Pis au milieu y’a des… des tourbillons d’îles flottantes, avec des orchidées hautes comme des arbres… Le Yang-Tsé-Kiang, camarade, c’est des millions de mêtres cubes d’or et d’fleurs qui descendent vers Nankin… Et avec, tout l’long, des villes-pontons où on peut tout acheter… De l’alcool de riz, d’la religion, et pis des garces, d’l’opium… Ch’peux vous affirmer, Tenanciêre, que le fusilier-marin a été longtemps l’élément décoratif des maisons d’thé… dans c’temps-là, on savait rire… – Elle s’était mise sur la paille / Pour un maquereau roux et rose / C’était un juif, il sentait l’ail / Il l’avait, venant de Formose / Tirée d’un bordel de Shangaï. î
– Oh, c’est beau !…
– C’est pas d’moi !… C’est des vapes, comme ça, qu’y m’reviennent… quand j’descends l’fleuve…
J.Gabin/P.Frankeur - – Avec lui, si vous avez pas soif, vous serez tout d’suite servi
P.Frankeur - – Pour un picon-biêre, c’est moitié-moitié?
– Ca peut le devenir. Mais je saute pas un obstacle sans élan.
Une serveuse/J.P Belmondo - – Ah! Nous y voilà. Ma bonne Suzanne tu viens de commettre ton premier faux pas. Y’a des femmes qui révêlent à leur mari toute une vie d’infidélité, mais toi, tu viens de m’avouer quinze années de soupçon. C’est pire.
J.Gabin - -Ton cient là, Fouquet. Ton espagnol. Douze verres cassés ça te dis rien?
– Monsieur. Primo, voila quinze ans que je vous interdis de me parler. deuxio, si vous ne vouliez pas qu’il boive, c’est simple, vous n’aviez qu’a pas le servir.
– Alors là monsieur, je vous retorque que, primo, je l’ai viré. deuxio, les ivrognes y’en a assez dans le pays sans que vous les fassiez venir de Paris.
– Un ivrogne?
– Ah ben oui ! Un peu ! Même le pêre Bardasse qui boit quatorze pastis par jour n’en revenait pas !
– Ah parce que tu mélanges tout ça, toi ! Mon espagnol, comme tu dis, et le pêre Bardasse. Les Grands Ducs et les bois-sans-soif.
– Les grands ducs?!
– Oui monsieur, les princes de la cuite, les seigneurs, ceux avec qui tu buvais le coup dans le temps et qu’on toujours fait verre à part. Dis-toi bien que tes clients et toi, ils vous laissent à vos putasseries, les seigneurs. Ils sont à cent mille verres de vous. Eux, ils tutoient les anges !
– Excuse-moi mais nous autres, on est encore capable de tenir le litre sans se prendre pour Dieu le Pêre.
– Mais c’est bien ce que je vous reproche. Vous avez le vin petit et la cuite mesquine. Dans le fond vous méritez pas de boire. Tu t’demandes pourquoi y picole l’espagnol ? C’est pour essayer d’oublier des pignoufs comme vous.
J.Gabin/P.Frankeur - – Écoute ma bonne Suzanne. Tu es une épouse modêle.
– Oh…
– Mais si, t’as que des qualités et physiquement, t’es restée comme je pouvais l’espérer. C’est le bonheur rangé dans une armoire. Et tu vois, même si c’était à refaire, je crois que je t’épouserai de nouveau. Mais tu m’emmerdes.
– Albert!
– Tu m’emmerdes gentiment, affectueusement, avec amour mais tu m’emmerdes.
J.Gabin/S.Flon - – Dis-toi bien qu’si quelque chose devait m’manquer, ce serait plus l’vin, ce serait l’ivresse…
J.Gabin - – Je crains malheureusement qu’on ne s’attache pas à une femme avec des vertus culinaires. Avec des vertus d’aucune sorte d’ailleurs.
- – Il est autant anglais que Lawrence d’Arabie est arabe. Perfidie légendaire!
J.Gabin - – Si je buvais moins, je serai un autre homme. Et j’y tiens pas.
J.P Belmondo - – Sous pretexte de nous empêcher de boire, elles ne rêvent qu’à nous mettre en bouteille.
- – Que ce soit la révolution ou la paëlla, dis-toi bien que rien de ce qui est espagnol n’est simple.
J.P.Belmondo - – Si la connerie n’est pas remboursée par les assurances sociales, vous finirez sur la paille.
J.P.Belmondo - – Une paella sans coquillages, c’est un gigot sans ail, un escroc sans rosette.
J.P.Belmondo - – J’espêre qu’elle me fera tout de même la grâce d’assister à mes débuts dans les arênes monumentales… Y’aura du monde!.. Luis Miguel attire toujours la foule!.. Y’a longtemps que je rêve de triompher à Madrid… Le public sera exigeant…surtout derriêre Miguelito… Je vais être obligé de prendre des risques…Je vais mettre mon costume blanc, celui de mes débuts… Vous vous souvenez de cette novillada de Tolêde… Ce vent froid…Ce public affreux…Et ce taureau qui ne voulait pas mourir… Depuis j’en ai estoqué plus de cent!.. Je suis le plus grand matador français!.. Gabriel Fouquet…Plus celêbre que Fierchoul…Yo soy unico!.. Ca vous intéresse, papa?
– Peut être?
– Et qu’est ce qui vous intéresse? La matador, le taureau ou l’Espagne?
– Le voyage, votre façon de voyager
– Ah ça c’est un secret!
– Oh la la !.. Le véhicule je le connais, je l’ai déjà pris, et c’était pas un train de banlieue, vous pouvez me croire…Moniseur Fouquet, moi aussi il m’est arrivé de boire… Mais ça m’envoyait un peu plus loin que l’Espagne… Le Yang tsé Kiang… Vous avez déjà entendu parler du Yang Tsé Kiang?.. Ca tiens de la place dans une chambre, moi j’vous l’dis!
– Sûr!… Alors deux xérês?…
– Je ne bois plus, je croque des bonbons…
– Et ça vous mêne loin?
– En Chine toujours, mais plus la même… Maintenant c’est une espêce de Chine d’antiquaire… Quant à descendre le yang tsé Kiang en une nuit c’est hors de question… Un petit bout par çi, un petit bout par là… Et encore, pas tous les soirs… Les sucreries font bouchon…
J.P Belmondo / J.Gabin - – Le Yang Tsé Kiang n’est pas un fleuve, camarade… C’est une avenue… Une avenue de 5000 kilomêtres qui dégringole du Tibet et qui s’arrête à la mer Jaune… A gauche et à droite des jonques, des sampans… Au milieu, en plein courant, des tourbillons d’îles flottantes… Des orchidées hautes comme des arbres et des troupeaux de buffles… Des millions de mêtres en cubes d’or, de fleurs et de limon qui descendent vers Nankin, au milieu des pagodes et des ville en bois… Des villes pontons où tout est à vendre: l’alcool, le poisson cru, les putains, l’opium…
J.Gabin - – Y’a pas de bonnes habitudes. L’habitude, c’est une façon de mourir sur place.
- – Mourir saoûl, c’est mourir debout.
Le Cave se Rebiffe
- – Ah évidemment j’en suis pas encore aux toiles de maître, mais enfin c’est un début!
– Oh… c’est un début qui promet. Mais tu vois si j’étais chez moi comme tu le disais si gentiment, bah j’mettrai ça ailleurs.
– Qu’est-ce que je disais, y s’rait mieux prês de la fenêtre. Tu le verrais où toi ?
– À la cave.
B.Blier/J.Gabin - – Parce que j’aime autant vous dire que pour moi, Monsieur Eric, avec ses costumes tissés en Ecosse à Roubaix, ses boutons de manchette en simili et ses pompes à l’italienne fabriquées à Grenoble, eh ben, c’est rien qu’un demi-sel. Et là, je parle juste question présentation, parce que si je voulais me lancer dans la psychanalyse, j’ajouterais que c’est le roi des cons… Et encore, les rois, ils arrivent à l’heure…Parce que j’en ai connu, moi, mon cher Maître, des Rois… Et pis pas des p’tits… Des Hanovre… Des Hohenzollern… Rien qu’du micheton garanti croisade… Mais vous m’voyez-là, maintenant, mais moi, j’ai pas toujours tenu un clandé !… Vous avez pas connu la Rue du Chabanais… Soixante chambres !… Et y z’ont filé tout ça aux P’tites Soeurs des Pauvres !… Quand j’y pense, tiens… Alors, c’est pour vous dire que votre ami Éric, ses grands airs, y peut s’les cloquer dans l’baba !…
B.Blier - – L’honnêteté, ça se paye.
A.Balpetre - – L’éducation, ça s’apprends pas.
B.Blier - – Mon cher, je sais que le dicton veut qu’on n’prête qu’aux riches… mais on n’leur prête pas à vingt pour-cent. Je n’demanderai pas mieux que d’placer votre argent dans la famille Rotschild, malheureusement…
– Oh mon cher Maître j’vous en prie ! Entre l’Baron Edouard et un traîne patins comme Eric, y’a une marge… D’ailleurs à propos d’marge, j’trouve un peu baroque d’vous prêter à huit pour-cent du pognon qu’vous faites travailler à vingt.
A.Balpetre/B.Blier - – Mais pourquoi j’m’énerverais ? Monsieur joue les lointains ! D’ailleurs, j’peux três bien lui claquer la gueule sans m’énerver !
B.Blier - – Dans un ménage, quand l’homme ne ramêne pas un certain volume d’oseille, l’autorité devient, ni plus, ni moins, d’la tyrannie !… Et l’autoritaire, un simple emmerdeur prétentieux !…
B.Blier - – L’affaire redeviendrait possible si on pouvait faire contrôler nos sterling par un spécialiste…
– Vous en connaissez un ?
– Le meilleur !… Pis blanchi sous le harnais, hein… Trente ans d’fausse monnaie et pas un accroc… Un mec légendaire, quoi… Les gens de sa partie l’appellent le Dabe et enlêvent leurs chapeaux rien qu’en entendant son blase… Une épée, quoi…
– S’il est aussi fortiche que tu l’dis, ce… ce Dabe, y doit avoir de gros appétits ! Combien y va encore nous piquer ?
– Si un homme comme ça entre dans la course, ça n’a pas d’prix !… Parce qu’avec lui, y’a pas d’problême… C’est comme si on s’associait avec la Banque d’Angleterre… Nos sterling, on pourra les montrer à Pinay !…
B.Blier/A.Balpetre - – T’es là pour longtemps j’espêre ?
– En principe non, mais t’sais dans les affaires on sait jamais. Tu t’déplaces pour trois semaines et pis tu peux rester vingt piges, ça c’est vu.
G.Leclerc/J. Gabin - – Pour une fois que je tiens un artiste de la Renaissance, j’ai pas envie de le paumer à cause d’une bévue ancillaire!
– Une quoi ?
– Une connerie de ta bonniche…
J.Gabin/B.Blier - – Le Bon Dieu aurait pu te faire honnête, tu as de la chance il t’a épargné.
J.Gabin - – Je connaîs ton honnêteté, mais je connais aussi mes classiques. Depuis Adam se laissant enlever une côte jusqu’à Napoléon attendant Grouchy, toutes les grandes affaires qui ont foiré étaient basées sur la confiance…
J.Gabin - – Faire confiance aux honnêtes gens est le seul vrai risque des professions aventureuses
J.Gabin - – Entre nous, Dabe, une supposition… Hein, je dis bien une supposition, que j’ai un graveur, du papier, et que j’imprime pour un million de biftons. En admettant, toujours une supposition, qu’on soit cinq sur l’affaire, ça rapporterait, net, combien à chacun ?
– Vingt ans de placard. Entre truands, les bénéfices ça se partage, la réclusion, ça s’additionne.
B.Blier/J.Gabin - – Le faux talbin est un travail qui se fait dans le feutré.
J.Gabin - – J’t’enverrai un gonze dans la semaine. Un beau brun avec des petites bacchantes. Grand. L’air con
– Ca court les rues les grand cons.
– Oui mais celui là, c’est un gabarit exceptionnel! Si la connerie se mesurait, il servirait de mêtre étalon! Y serait à Sêvres!
J.Gabin / F.Rosay - – Y suffit de mettre un gigot au four pour voir s’amener les emmerdeurs.
- – Dans la vie, ne pas reconnaître son talent, c’est faciliter la réussite des médiocres.
J.Gabin - – Maint’nant dis donc Charles, si t’as besoin d’quelques briques, tu sais qu’j’suis toujours un peu armé moi.
– Oh ! Non. J’en suis pas encore là, j’suis pas v’nu pour te bottiner. Quoi qu’la fraîche elle décarre petit à p’tit et pis si ça continue comme ça, un d’ces quatre, j’vais m’retrouver sur les jantes.
– Bon, bah puisque t’en es pas encore là, alors écoute-moi. Dis toi bien qu’tes p’tites misêres c’est rien à coté de c’qui t’attends si tu persistes dans tes rêveries. Parce que dans l’faux talbin, alors là tu vas la comprendre ta douleur. Tu vas y laisser ta santé. Tu vas les découvrir les vicieux, pas ceux qu’tu connais d’habitude. Moi j’te parle des vrais, ceux qu’ont les grandes dents. Y vont t’bectarés tout cru les vilains. Note bien j’sais pas pourquoi j’te raconte ça puisque tu s’ras enchrister avant d’avoir touché une petite tune.
– Tu crois ?
– C’est un coup sûr tu vaux cent contre un dans l’parcours. Tiens prend un beignet là. Tu vas voir c’est bon, c’est du poissecaille que tu trouve pas en France.
– Dis donc, il est girond ton p’tit sommelier.
– Ah ! Bah si l’cœur t’en dis j’peux t’le bloquer pour la sieste.
– Ah ! Non tu vois c’est drôle, mais…j’ai plus d’goût à rien.
– Mais te laisses donc pas aller mec, tu trouveras bien une autre façon d’en r’trousser d’l’oseille, crois-moi c’est un service que j’te rend.
– Beuh !
– Bon ! Bah, puisqu’as pas l’air de m’croire, tu sais combien j’ai fait d’opération en trente piges d’exercice ?
– J’sais pas moi, une dizaine.
– Non, Monsieur. Cinq. Y’en a quatre qu’ont bien tournées et puis y’a eu la cinquiême.
– Ca a pas marché ?
– Ah ! Non, ça n’a pas marché. Et pourtant j’pouvais croire que j’avais tous les atouts en main. Léon le stéphanois, qu’etait un vrai Rubbens, m’avait gravé un cent Florins plus beau qu’le vrai. J’avais trouvé l’papier en Italie et les encres en Suisse. La bécane, j’mettais mouillé d’sept briques. J’l’avais fait v’nir de chez Kottenburg à Leipzig. Et encore pour plus de sécurité, j’l’avais fais transiter en piêces détachées, moitié par l’Italie, moitié par l’Portugal. Tu peux pas savoir.
– Oh ! Dis donc…
– Et attends, attends, c’est pas tout. En huit heures au chrono, les deux millions d’Florins étaient tombés, la bécane démontée, la gravure détruite et tout l’papelard brulé. Tout ! Tout ! Tout ! Tout !
– B’en alors qu’est ce qu’a pas marché ?
– Eh ! B’en devine.
– Ton client qui t’a pas casqué ?
– Non !
– T’as eu des ennuis avec les perdreaux ?
– NON !
– Alors là, j’vois pas.
– Le dix sept Juin quarante cinq, ça t’dis rien ça, à toi, l’dix sept Juin quarante cinq.
– Non (de la tête)
– Et b’en l’dix sept Juin quarante cinq la banque Royale des Pays Bas a annoncé qu’la coupure de cent Florins était démonétisée et r’tirée d’la circulation, bloquée en banque. Un vane de Madame la reine Wilhemine. A j’m’en rappellerai d’celle là. A cause d’elle j’me suis farci un feu d’cheminée d’quinze cent millions.
– Ils avaient l’droit d’faire ça ?
– Pauv’e con ! Le droit ! Mais dis toi bien qu’en matiêre de monnaie les états ont tous les droits et les particuliers aucun !
J.Gabin/B.Blier
Le Corps de mon Ennemi
- – Vous avez un pronostic pour le match (France-Allemagne)? Moi je dis que ça va pas être une promenade. Attention, les Allemands, sur leur terrain, faut jamais les sous-estimer.
– Parfois même sur le notre.
Un taxi/J.P Belmondo - – Si je te disais que la population a presque doublée
– Deux fois plus de cons…Ca paraît pas possible.
J.P Belmondo - – La province fout le camp…La rue du Commerce est devenu un énorme étalage qui déborde de partout, qui dévore la rue… Une ville folle, hagarde… Une foire au gadget aux portes béantes en miroir, acier et plexiglas, aux slogans péremptoires: « A saisir »… »Liquidation »… »Nos prix qui pulvérisent »… un mode qui brade…qui bazarde…qui se débarasse d’objets qui ne servent à rien qu’à être achetés.
J.P Belmondo - – Doit-on appeler ça faire l’amour ou le défaire?
- – Songez, mes frêres, qu’il y a des hommes qui risquent de perdre leur salut éternel pour un plaisir de bête qui, me suis-je laissé dire, ne dure parfois que trente à quarante secondes.
Un curé - – Votre pêre à son caractêre, mais nous avons tous le notre…
– Non, Monsieur, n’en a aucun!
B.Blier/J.P Belmondo - – On donnait dans le social…On faisait semblant de faire de la charité… Nous ne donnions jamais d’argent car on nous avait prévenu: Quand on donne de l’argent aux pauvres, ils le boivent.
M.Laforêt - – A votre âge et quand on porte votre nom, les gros mots ne peuvent être que des citations.
J.P Belmondo - – On connaît le poids d’un penalty sur un bulletin de vote.
J.P Belmondo - – Chaque but marqué par ce tzigane pêse plus lourd dans une urne que tes meilleurs discours.
B.Blier - – Le football n’intéresse que les politiciens, les enfants et les fabricants de ballons.
J.P Belmondo - – Qu’est ce qui me dit que vous n’allez pas me descendre, aprês?
– Tu préfêres avant?
Un truand/J.P Belmondo - – Vous n’allez pas répondre pourquoi à toutes les questions que je vous pose?
– Pourquoi pas?
B.Blier/J.P Belmondo - – Moi aussi j’aimerais bien des roses plein les bras.
– Eh bien tu les lui porteras !
M.Laforêt/J.P Belmondo - – Suivant la force d’attaque sur cette balle et le choc sur cet écran, l’ordinateur reproduit la longueur du coup et l’approche par rapport au trou. Si le prochain modêle comporte un brumisateur et une soufflerie, ça ne sera plus la peine d’aller à Deauville!
B.Blier - – Dans ce bric à brac de la mémoire, chaque fois qu’on essaye de se souvenir du jeune homme que l’on était, on se revoit avec la tête de l’homme d’aujourd’hui.
J.P Belmondo - – Pendant qu’une saine jeunesse agite des calicots, elle ne brandit pas de pancarte.
J.P Belmondo
Faut pas Prendre les Enfants du Bon Dieu pour des Canards Sauvages
- – Une fille qui fait 95 de tour de poitrine et 32 de tour de tête ne peut pas vraiment être mauvaise. Elle peut seulement être légêrement sotte.
- – Un pigeon, c’est plus con qu’un dauphin, d’accord… mais ça vole…
A.Pousse - – C’est pas inhumain d’entendre ça ! Mais qu’est-ce que tu veux que je fasse avec cinq cents briques, hein ! Surtout d’nos jours… Le SMIC est en plein chancelique, la TVA nous suce le sang, la Bourse se fait la malle… J’ai calculé, j’en aurais à peine pour cinq piges… J’aurais cinquante berges… Tu voudrais tout d’même pas que j’retourne au charbon à c’t âge-là, non ? Tu serais pas vache avec les vieux, des fois ?
B.Blier - – Mais Charles, je te donnerais cet argent avec le plus grand plaisir, mais nous sommes samedi… et les banques sont fermées…
– Mais chaque fois qu’t’es rentrée dans une banque, elle était fermée !… La Chase Bank de Dallas ! Et la BNP d’Levallois ! Ça t’dit rien, non ?!
F.Rosay/B.Blier - – J’ai bon caractêre mais j’ai le glaive vengeur et le bras séculier. L’aigle va fondre sur la vieille buse.
– C’est chouette ça, comme métaphore.
– C’est pas une métaphore, c’est une périphrase.
– Oh fait pas chier !
– Ça, c’est une métaphore.
B.Blier - – Messieurs, si je vous ai arrachés à vos pokers et à vos télés, c’est qu’on est au bord de l’abîme. La maladie revient sur les poules. Et si j’étais pas sûr de renverser la vapeur, je vous dirais de sauter dans vos autos comme en 40. Le tocsin va sonner dans Montparnasse. Il y a le cholera qu’est de retour. La peste qui revient sur le monde. Carabosse a quitté ses zoziaux. Bref, Léontine se repointe. Bon, je récapitule dans le calme: On la debusque, on la passe à l’acide, on la dissout au laser et on balance ce qui reste dans la lac Daumesnil.
B.Blier - – Je pourrais pas vivre aux Indes. je dis les Indes comme je dirais la Chine! C’est la même misêre tout ça!… Je suis sûr qu’un jour aux Indes, y mangeront les touristes…comme ça… sans méchanceté… un coup de fringale. Pareil en Chine, vous verrez qu’y ne boufferont pas toujours que du riz en Chine…Y tourneront voraces.
B.Blier - – Je gagne quatre mille francs par mois. J’ai un livret de caisse d’épargne, une carte bleue, 50% de réduction sur les chemins de fer. bref, ce qu’on appelle un parti. Pas d’attendrissement, pas de larmes. Tu souris, tu dis oui.
B.Blier
Le Cri du Cormoran le Soir au-Dessus des Jonques
- – Allons, allons, Freddy… Le récif de corail, la maison d’Gauguin, les p’tites fleurs, le chant du Ukulélé, le soir, sous les manguiers… Hum !
– Ha !… Ah, ben, puisque vous en êtes à l’audiovisuel, alors permettez !… Le Bosphore, hein !… Éh ben, l’Bosphore, c’est pas d’la merde non plus !… Tiens ! Matez les couleurs !… La Corne d’Or, la Mer Noire, la Mosquée Bleue… Et les minarets ? Mordez les minarets ! Vous avez jamais entendu, ch’uis sûr, l’appel du muezzin !… Woualllaaa-woualllaaa-woualllaa !… La fascination d’l’Orient, quoi !
– J’ai connu… Devant la Mosquée de Soliman le Magnifique… Je portais un taupé lilas… Elle s’appelait Gertrude… Elle avait dans les hanches, ce balancement gracieux qu’ont les femmes qui ont beaucoup marché… On a failli se fixer, là-bas, acheter du terrain… On pensait même à une maison… Et puis, les intermittences du ceuur… Finalement, la maison, c’est elle qui l’a ouverte à Caracas.
– Ah, oui ! La Mano en la Mano !
– Vous avez connu ?
– Of course !
– Le terrain, c’est moi qui l’ai acheté sur la Plata del Sol, trois cents francs l’mêtre… Aujourd’hui, avec le goût des congés payés pour le flamenco et la paella, ça pêse un milliard !
– Et encore…
– Et encore ?
– Avec des bungalows dessus, hé…
– Oh, ben, évidemment, l’immobilier… La finalité marloupine… Vous voyez grand !
– J’vois moderne… J’ai pas cru aux terrains au lendemain d’la guerre, alors ça m’ronge…
– Est-il trop tard ?…
-… Car elles démarrent, Monsieur, les affaires, je l’sens !
– Voilà.
– Vous fournissez l’bord de mer, je fournis l’béton ! On promote à tout va, dans l’goût du jour ! Moitié hacienda, moitié clapier !
– On fourgue avant qu’ça s’lézarde !
– Et on fait la culbute !
– On repromote en Sardaigne !
– Belote et rebelote !
– Et on attaque l’Afrique ! Car c’est ça, l’avenir, Monsieur, l’Afrique !
– Vingt mille kilomêtres de plage !
– Pour les pousseurs de filets à crevettes, quelle promenade ! Y avez-vous songé ?
– Oh-la-la !
– Nous serons les pionniers des grandes transhumances ! Tous les prolos en charter le vendredi soir, retour le lundi matin, Quai d’Javel ou au Creusot… avec des sourires de pêcheurs de requins…
– Ou de pêcheurs de perles…
– Sans vouloir vous contrarier, la perle se pêche plutôt aux îles de la Sonde…
– Mais nous iront !
– Vous avez raison, nous irons partout ! À Zanzibar !
– Aux Galapagos !
– Dans la Baie d’Along ! Aaah, le cri du cormoran, le soir, sur les jonques… Crôa-crôa-crôa…
– Sans vouloir vous contrarier, ça, c’est plutôt le cri du Perroquet Bleu du Mato Grosso… Le cri du cormoran, c’est… Creuaaa-creuaaa-creuaaa-creuaaa !
– Refaites-moi ça, s’il vous plaît.
– Oh, três volontiers… Creuaaa-creuaaa-creuaaa-creuaaa !
– En effet, oui…
– Le SMIC sur la trace des Conquistadores… Y’a des dizaines de milliards à gagner…
– Des centaines !… Vous disiez ?
– Alors, je disais… Oh, je n’sais plus…
– Le vertige des grands bâtisseurs !… Il faudra que la rive gauche reste un peu snob… Je parle, bien entendu, de la rive gauche du Mékong…
– Ah, parce que vous avez déjà refourgué l’Afrique ?!
– Vous n’aviez pas compris que l’Afrique, c’n’était qu’un tremplin !
– Excusez-moi !
– Pour un bol de riz par jour, la main d’œuvre asiate nous grimpera des trois-piêces-cuisine avec vue sur l’Éverest… Et nous investirons les bénéfices sur la rive droite !
– Du Fleuve Jaune !?!
– Non, de la Seine… Nous finirons Avenue Matignon, comme tant d’autres
P.Meurisse/B.Blier
- – Coup de théatre…y’a deux portes-flingues qui le suivent
– Il les as vus?
– Non, mais eux ils l’ont vu!
– Ben, va voir !
– Ben, si ils m’ont vu?
– Qui vivra verra
Carlos /B.Blier - – Quand il n’y a rien, il n’y a rien. C’est net. Mais quand il y a quelque chose, ce quelque chose cache souvent autre chose.
- -Je voudrais bien savoir comment on va à Istanbul sans passeport?
– Dans un cerceuil.
J.Carmet
Un Taxi pour Tobrouk
- – Vous n’allez pas nous déballer toutes vos cartes postales, non ?!… Le couplet sur Paris, voilà deux ans qu’on en croque ! Ça revient comme du choux ! Les p’tits bistrots pas chers, les gambilles du samedi, la Place du Tertre et le Zouave du Pont de l’Alma !… Et dans cinq minutes, y en a un qui va nous sortir un ticket d’métro ou des photos d’la Foire du Trône !… Non, pour moi, tout ça, c’est râpé !… Il n’y a plus de Paris !… Il y a le gros Paris , un point, c’est marre !
– Seriez-vous insensible à la nostalgie, Brigadier Dudu ?
– Non, mais j’aime pas penser à reculons ! J’laisse ça aux lopes et aux écrevisses !
L.Ventura/C.Aznavour - – Mon pêre est à Vichy… C’est un homme qui a la légalité dans l’sang… Si les Chinois débarquaient, y se ferait mandarin… Si les Nêgres prenaient le pouvoir, y s’mettrait un os dans le nez… Si les Grecs…
M.Biraud - – A mon avis, dans la guerre, il y a une chose attractive : c’est le défilé de la victoire. L’emmerdant, c’est tout ce qui se passe avant. Il faudrait toucher sa prime d’engagement et défiler tout de suite. Avant que ça se gâte…
C.Aznavour - – Il vaut mieux s’en aller la tête basse que les pieds devant
- – Deux intellectuels assis vont moins loin qu’une brute qui marche.
M.Biraud - – A la guerre, on devrait toujours tuer les gens avant de les connaître.
M.Biraud - – Faut pas faire attention, c’est une brute née de la guerre
– En langage clinique on appelle ça un paranoiaque, en langage militaire un brigadier.
M.Biraud/C. Aznavour - – Si t’as pas un grand-pêre banquier, veux-tu me dire à quoi ça sert d’être juif?
G. Cobos - – Pendant que je découvrais Goethe, vous en étiez déjà à Mein Kampf. les français ont toujours eu un livre de retard!
Le Drapeau Noir flotte sur la Marmite
- – Quand je pense… Quand je pense que j’ai quitté un hidalgo !
– Vous appelez ça un hidalgo! Moi j’appelle ça un météque !
– Un météque ! Un météque qui possédait une hacienda en plein coeur du Brésil.
– Ma chêre, étant donné votre degré d’instruction, que vous premiez Caracas pour la capitale du Brésil, passe encore. Mais il est alarmant qu’à votre âge, vus confoncdiez une hacienda avec un claque !
G.Leclerc/J.Gabin
Comment Réussir dans la Vie quand on est Con et Pleurnichard
- – Présence mystérieuse, le volcan, jadis maléfique, a été domestiqué pour devenir l’ami d’l’homme… Le bienfaiteur de l’organisme… En dehors de ses fabuleuses propriétés, telles que réchauffer en hiver, rafraîchir en été, stimuler les lymphatiques et calmer les névropathes, c’est une explosion d’art et de rêve que le Roi des Vermouths offre à la méditation des poêtes !… Le Vulcani ne fait pas d’réclame… Arriêre, la bête hideuse !… Il fait entrer l’génie d’l’humanité dans l’foyer du consommateur… Je m’explique. Pour tout achat d’une douzaine de bouteilles de… du précieux nectar, Vulcani vous offre non seulement la Pléiade des cendriers coulés dans la lave des îles Éoliennes, mais encore… ça !… L’aristocratie de Westminster… La robustesse de Besançon… La finition suisse… Le chic parisien…
J.Carmet - – Des artistes comme toi, ch’fous un coup d’pompe dans l’piano, il en dégringole une douzaine !
– Confidence pour confidence, des connards comme vous, ch’fous un coup d’pompe dans la télé, il en dégringole cinquante !
D.Prevost/J.Birkin - – Y’a des aristocrates et des parvenus, dans la connerie comme dans le reste…
J. Birkin - – Un minable qui vit sur sa réputation, ben, c’est comme un champion qui ne mettrait jamais son titre en jeu.
J.Birkin - – J’étais sûr que tu étais formidable… Je suis pas déçu. Tu m’a loupée comme un chef! T’as pas arreté de dire des conneries, t’as failli m’étouffer au paddock avec ta cigarette, tu portes un maillot de corps, tu gardes tes chaussettes… Y’a même ta maman. y’a tout ! T’es une synthêse…
J.Birkin - – Chaque fois que nous faisons l’amour, c’est-à-dire pratiquement vingt-quatre heures sur vingt-quatre, elle m’oblige à lui raconter ma vie, ma guerre, ma réussite… Mes succês féminins… Oh, si j’vous disais qu’hier, alors que j’venais d’assouvir ses sens, elle, inerte, sur le lit dévasté… Moi, lui racontant comment j’avais satisfait aux exigences de huit femmes dans un boxon de Mostaganem, elle m’a regardé droit dans les yeux et elle m’a dit… que j’étais une synthêse…
J.P Marielle - – Un chagrin sans neige est un bonheur sans soleil.
- – Qu’il s’agisse de rasoirs, de clés de voiture ou de femmes, j’ai tout en double.
J.P Marielle - – La tête dure et la fesse molle… Le contraire de ce que j’aime.
J.P Marielle - – Si t’avais connu les samedis d’autrefois! Quand la paye tombait directement de l’usine au comptoir… Maintenant, elle passe par les pompes à essence, la paye